L’année dernière, j’avais décidé de participer à Inktober. Et puis, à cause du travail engendré par ma thèse, j’avais laissé tomber. Et puis, cette année, je me suis dit qu’à la place de baver devant les superbes créations des uns et des autres, j’allais m’y mettre, mais sans aller jusqu’à 31 dessins. Faut pas pousser, j’ai trop de boulot pour ça, donc, je me suis dit que j’allais faire entre un et deux dessins par semaine. Ce qui n’est déjà pas mal. Mais comme je n’avais pas envie de me conformer à une liste (les listes des autres, c’est pas trop mon truc), j’ai mixé des thèmes issus du #mabsdrawolleenclub avec l’un de mes thèmes de recherche favoris : les Vénus Anatomiques (j’ai bossé là-dessus notamment pendant mon master, la rapport au cadavre et à la mort). En fait, il s’agit de variations autour d’une même Vénus. Il faut savoir que la Vénus Anatomique est une forme symptomatique de la vision de la femme au XIXe siècle : si elle est belle, on la préfère morte, c’est-à-dire non dangereuse. Belle et vivante, on va la corseter à mort (au sens propre comme au sens figuré) pour éviter qu’elle n’intervienne trop dans la vie intellectuelle notamment. Une belle plante quoi, décorative, qui sert à rien à part être un beau trophée pour son mari ou son amant… Bon, il y aura quand même quelques exceptions mais elles ne seront pas légions. La Vénus Anatomique c’est aussi une manière d’apprivoiser la mort, de l’intellectualiser, de la rendre moins effrayante. C’est un énorme résumé, mais si vous voulez d’autres renseignements, je vous conseille les livres de Joanna Ebenstein, et les très bons articles de Laurie Laufer, qui a beaucoup écrit sur le rapport au corps, et notamment au corps mort ( voir notamment : La Morgue, Images du spiritisme, et mon favori La Belle Mort).
Je n’ai pas voulu forcer le trait féministe, c’est pas mon genre. Je connais bien les Vénus et leurs histoires, mais je les aime quand même, c’est quelque chose d’assez fascinant, une sorte de Blanche-Neige hardcore (oui, dans la version Grimm, Blanche-Neige est dans un cercueil de verre, genre une sainte morte…)…
Voici donc mes versions :
Donc, c’est toujours la même Vénus, ça se voit, mais avec différents thèmes… J’aime particulièrement, la Vénus Vampire, la Bat-Vénus, Coven et la Vénus-Sorcière. J’ai beaucoup moins bien réussi la Vénus-Sirène malheureusement, mais bon, c’est comme ça. Pour la Vénus-Hécate, en fait le thème était « Chien noir ». Cela m’a fait penser bien sûr à Hécate et ses chiens, et du coup, à Anubis. J’étais à l’époque du dessin en train de regarder un film de la Hammer, intitulé « Blood for Mummy Bomb » (toujours aussi délicats les titres de la Hammer), et du coup, à fond dans l’Égypte revue et corrigée par la culture pop. Pour Coven, le nom m’a fait penser aux sorcières, puis au dédoublement de personnalité, du coup, aux soeurs-siamoises. Sachez que mon dessin est archi-faux d’un point de vue anatomique, il n’y a jamais de séparation de la colonne à cet endroit-là précisément. Mais il fallait que ça fonctionne au-niveau du dessin, donc, au diable le réalisme…
Maintenant, le process : avec quoi je dessine, comment je fais, et où je dessine ?
Je suis souvent assise par terre en ce moment pour dessiner, plus pratique que sur mon canapé, et surtout parce que je regarde souvent quelque chose à la TV quand je dessine. Vous pouvez voir ici que j’ai toujours des magazines à portée de main (je suis une grande fan de Citizen K, il y a toujours des articles très intéressants sur l’art et le design…). Sur l’image du haut, mon carnet : du A3 à spirale, les pages sont détachables. Là c’est du papier recyclé, donc, c’est exclusivement pour des dessins qui ne seront jamais exposés, ils passent par une colorisation numérique. Je me sers également beaucoup d’une tablette lumineuse format A4 si je veux reprendre un motif que j’ai déjà dessiné ailleurs, ça évite de décalquer, ça va plus vite. Vous avez des tablettes lumineuses chez Action, format A4 et A3 pour des sommes très correctes.
Ce type de dessin est entièrement réalisé à la mine de plomb type Critérium, en taille 0.5. Je gomme avec une gomme mie de pain, grise ou blanche (évitez les couleurs, elles laissent souvent des traces). Ensuite, je repasse les traits avec un feutre noir Paper Matte, puis je photographie et je colorise via Photoshop (il faut donc faire attention à ce qu’il n’y ait pas de trous au feutre noir entre deux espaces à coloriser). Ci-dessous, la totalité des dessins non colorisés :
Bilan de l’Inktober 2021 : beaucoup de travail, un résultat plutôt satisfaisant malgré tout, et un challenge relevé qui rend fière (ben oui, quand même…). J’en ferais sans doute une édition, avec des textes sur la Vénus Anatomique.
Sur ce, je vous souhaite de belles fêtes !